- Blog
"Ma langue française est une passerelle" par Rosa de Diego, professeur de littérature française à l'UPV/EHU (Journée internationale de la langue française)
A l'occasion de Journée internationale de la langue française, Rosa de Diego, professeur de littérature française à l'UPV/EHU nous fait entrer avec délectation dans l'intimité de sa relation avec la langue française
C’est la fête de la francophonie ! Cet espace imaginaire où se rencontrent des Africains, des Américains, des Asiatiques, des Européens, parce que tous peuvent aisément communiquer entre eux grâce à la langue française. Une langue meurt quand plus personne ne la parle. La langue française est loin de s’éteindre ; elle se développe, sans arrêt, dans des lieux insolites, singuliers, surprenants. C’est une langue qui dépasse les frontières géographiques, les enceintes idéologiques, sociales ou religieuses, pour réunir à tous ceux qui habitent à Bordeaux, Beyrouth, Bruxelles, Dakar, Haïti, La Guadeloupe, La Martinique, Québec, Rabat…
Ma patrie c’est la langue française. Michel Serres répondait en écho à Albert Camus en disant, Oublier sa langue, c’est perdre son âme. Au moyen de la francophonie, la langue française est largement pratiquée. Les poètes, des femmes et des hommes qui rêvent en français, font danser des beaux mots, des verbes libérateurs, des paroles tragiques, satiriques, magiques. C’est grâce à eux qu’une langue, menacée par le progrès d’une autre, reste vivante. Mais il ne faut pas avoir peur. Que l’anglais fasse concurrence au français partout dans le monde ne signifie pas que la langue française ne préserve pas son intégrité. Comme Cioran disait on habite une langue.
Oublier sa langue, c’est perdre son âme.
En nuestro país, un país bilingüe, el sistema educativo no apuesta por un plurilingüismo real en lo que se refiere a la enseñanza de las segundas lenguas extranjeras. De manera recurrente el aprendizaje de idiomas se reduce al estudio del inglés. El francés sobrevive gracias a la heroicidad de sus profesores. La enseñanza obligatoria de una segunda lengua extranjera es la mejor apuesta política por un plurilingüismo real. Son muchas las razones para aprender francés en el País Vasco, por su cercanía con Francia, por sus diversas relaciones, por la tradición.
Une langue d’amour. J’ai la grande chance de parler et d’enseigner le français, la langue de la solidarité et l’ouverture, de l’échange et du partage, qui matérialise des siècles de diversité culturelle. Ma langue française est une passerelle vers l’art, la littérature. A côté des livres, j’ai trouvé du réconfort. Mais aussi distraction, beauté, émotion, connaissances. J’aime ses acteurs, ses adversaires, ses passions, ses querelles. Mais si je devais résumer en deux mots l’image que j’ai de la littérature, sans doute je dirais : le plaisir du texte. Le plaisir, les histoires, les personnages, la surprise, l’intelligence, la séduction, l’espoir, la douleur, le rire. Mais tout cela n’est rien sans le texte, la langue, ce mystère qui entoure le mot juste.
Dans l'image: Notredame vue de la Seine
La littérature nous apprend à pleurer quand nous en avons besoin, à sourire s’il le faut, elle nous montre les chemins de l’amour, lorsque c’est le moment d’aimer, et elle nous accompagne dans la piqûre du chagrin quand il s’enfonce dans la peau. Marcel Proust considérait les livres comme des amis reposants, qui ne nous jugent pas et que nous ne pouvons pas blesser. La bibliothèque est une chambre d’amis précise Tahar Ben Jelloun. La littérature a un certain pouvoir thérapeutique, que Le Clézio définissait comme la dernière chance de fuite, une sorte d’indemnité supplémentaire.
Marco Polo, Montaigne, Casanova, Rivarol, Stendhal, Zola, Apollinaire, Ionesco, Adamov, Camus, Duras, Sarraute, Huston, Pennac, Beckett, Semprun, Maalouf, Nothomb... Des écrivains venus d’ailleurs. Ils ont bouleversé, enrichi et développé les lettres françaises amenant avec eux leur mémoire, leur imaginaire, les traces d’autres langues, les traces d’autres cultures.
Victor Hugo disait que Tout homme qui écrit un livre et ce livre c’est lui. Il y a un effet miroir dans la littérature dont parlent plusieurs écrivains, centralisation et vaporisation (Baudelaire), Madame Bovary, c’est moi (Flaubert), je est un autre (Rimbaud), solitaire, solidaire (Camus). Et c’est dans ce sens que je voudrais revendiquer la singularité de la lecture : une activité solitaire qui nous met en contact avec le reste du monde. La littérature est ce que l’on a trouvé de mieux pour prouver aux hommes qu’ils font partie d’une collectivité et qu’ils se ressemblent.
En ce jour de la francophonie je voudrais faire l’éloge de cette parole bi-langue, métissée, que Senghor expliquait ainsi : j’écris en français, je pense en négro-africain. Léon Laleau veut apprivoiser avec des mots de France un cœur qui vient du Sénégal. Ces mots français qui ont protégé Chahdortt Djavann quand elle n’avait rien, pas même l’espoir de survivre. Le turc Nedim Gursel constate qu’il n'habite pas une ville ou un pays, mais deux langues. Julia Kristeva revendique le droit de pouvoir exprimer son intimité dans la langue française, qui est mon abri d’exilée.
La lengua francesa es un elemento aglutinador más allá de fronteras, tradiciones, culturas. Es un lugar de asilo.
Une dernière observation. L’écrivain francophone est obligé de penser la langue: cette surconscience linguistique implique une position d’inconfort, de réflexion et de rénovation. Lise Gauvin propose d’appeler cette littérature francophone, une littérature de l’intranquillité, où il y a sans cesse un engagement de l’écrivain avec la langue, un "langagement", un besoin de confirmer une forme d’expression propre, le signe d’une identité.
La lengua de Molière y Tremblay, de Monet o Magritte, de los hermanos Lumière y de Maïmouna N’Diaye, de Ravel o Céline Dion, se ha caracterizado durante muchos siglos por su vitalidad, como referente cultural. En estos tiempos se habla mucho de crisis. Creo que la cultura es el cimiento de la sociedad y posibilita su resurrección. Confiemos en la cultura; es lo que permanece eternamente en la memoria de mujeres y hombres. La lengua francesa es un elemento aglutinador más allá de fronteras, tradiciones, culturas. Es un lugar de asilo. Y sin esta palabra, viviríamos en un mundo silenciado.
Noticias relacionadas
Suscríbete a Newskampus
Y recibe nuestras últimas noticias en tu email.